Le
navire, types et caractéristiques
Il n'existe pas de navire négrier spécifique,
c'est un navire de commerce ordinaire, parmi lesquels on trouve tous les
types de navires et de toutes tailles. C’est ainsi qu’après les
caravelles portugaises du XV et XVI° siècle, on a vu apparaître au
XVII° siècle les galions espagnols et les flûtes hollandaises, mais
aussi d’anciens bâtiments de guerre recyclés pour la traite, comme
les frégates, moins lourdes et plus rapides que les vaisseaux, ou les
corvettes, rapides et maniables, intermédiaires entre frégate et
brick. Mais au XVIII° siècle, le préféré des négriers (et des
pirates) était le brick, pour ses qualités de manœuvre et de vitesse,
idéales pour le cabotage et la course en mer. Ces petits navires, très
rapides, pouvaient échapper aux croisières de répression lorsque la
traite deviendra illégale.
En fait le choix est surtout dicté par les
conditions de navigation car il faut pouvoir s'approcher au plus près
des côtes africaines ou pénétrer dans l'embouchure des fleuves. Mais
l’élément le plus important est la vitesse car plus courte sera la
traversée, plus faibles seront les pertes. Le trajet dure quand même
plus d'un mois, souvent deux, parfois trois. Par exemple pour un navire
partant d'un port français (17 ports français participèrent a plus de
3000 expéditions négrières), il faut compter 2-3 mois pour atteindre
l'Afrique; 3-4 mois de cabotage sur les côtes africaines entre chaque
centre négrier (ou chaque comptoir) pour embarquer les captifs, puis
encore 2-3 mois pour atteindre les côtes Antillaises.
L’affectation
à la traite
La préparation d'un navire négrier est plus chère
que celle d'un navire de commerce normal à cause du nombre d’hommes
d'équipage (deux fois plus nombreux), de l'avitaillement plus important
et de la cargaison de traite. La cargaison de traite est l'ensemble des
marchandises servant à acheter les esclaves (alcool et tabac, poudre et
armes à feu, camelote et pacotilles, étoffes et habits). De plus, pour
entasser les esclaves dans la cale, il faut prévoir un entrepont qui
servait de « parcs à esclaves », rajouter des gaillards et
des palissades et au besoin les construire. Pour augmenter la surface
disponible, les négriers faisaient aussi installer des plates formes
(faux pont) sur les côtés.
Un
équipage spécialisé
Financièrement, il est important, pour un négrier,
de livrer une « cargaison de bois d’ébène » (en référence
à la couleur des esclaves noirs) en bon état, avec le minimum de
pertes. C’est pourquoi, à bord, quatre personnages ont une importance
particulière. Le capitaine en plus de ses compétences de navigation
doit posséder des compétences commerciales. C’est lui qui négocie
l’achat de la « marchandise » avec les marchands
d’esclaves africains et la revente aux colons à l’arrivée, de plus
il est intéressé par un pourcentage
sur le prix de chaque "pièce" débarquée et vendue. Enfin il
doit être un meneur d’homme et savoir mater les révoltes à bord.
Sur le
charpentier repose l'aménagement du navire. D’où
l’importance d'avoir un bon charpentier, plus pour le transport des
esclaves que pour le transport des marchandises, et quand le navire
arrive sur les côtes africaines, c’est lui qui prépare le
"parcs à esclaves » pour l’embarquement des africains. On
trouve ensuite le tonnelier,
responsable de la qualité de l’eau et de sa bonne conservation. Il
faut en effet beaucoup d'eau pour alimenter un bateau chargé
d’esclaves et une eau avariée peut causer des pertes importantes.
Enfin un chirurgien (à l'époque ce n'est pas un médecin) est
indispensable pour s’assurer de la bonne santé des captifs à
l’achat, pour les marquer au fer rouge, les rendre présentables à la
fin du voyage, et parfois pour détecter l'apparition des maladies ou
des épidémies, sans toutefois pouvoir traiter les malades. Ces spécialistes,
dont le travail est pour beaucoup dans la réussite financière d’une
expédition négrière, étaient classés parmi les officiers et
touchaient un salaire comparable. Le reste de l’équipage est formé
de matelots, plus ou moins enrôlés, parfois kidnappés dans le cas de
la marine anglaise, mais aussi de forbans et d’aventuriers en tout
genre.
(Suite...)
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